RÉSERVER
Château de Thorens
4 étoiles

CAMILLE DE CAVOUR

Camille de Cavour (1810-1861)

Philippine de Sales (1762-1849) - fille du marquis Paul-François (1721-1795) - épousa, en 1781, Joseph Benso marquis de Cavour. Leur fils Michel de Cavour (1781-1850) fut nommé chambellan du prince Camille Borghèse, grâce à la bienveillance de l'empereur Napoléon 1er. L'empereur confia également une charge de cour à Philippine en la nommant dame d'honneur de sa sœur, la princesse Pauline, épouse du prince Borghèse. Ce dernier fut le parrain du futur grand homme d'Etat, Camille de Cavour, à qui il donna son prénom.

Camille de Cavour (1810-1861) était le second fils de Michel de Cavour et d'Adèle de Sellon, petit-fils de Joseph de Cavour et de Philippine de Sales. Son frère aîné, Gustave (1806-1864) était le sixième marquis de Cavour. Camille, comte de Cavour, entama une carrière militaire, puis s'orienta en politique après avoir organisé une agriculture modèle dans les vastes domaines de son père.D'abord élu député au Parlement du royaume de Sardaigne (26 juin 1848), sous le règne du roi Charles-Albert (1798-1831-1849), Cavour devint ministre de l'agriculture, du commerce et de la marine (11 octobre 1850) avant  d'accéder au poste de Président du Conseil des Ministres, le 2 novembre 1852.

Ami intime du roi de Sardaigne Victor-Emmanuel II de Savoie (1820-1878), monté sur le trône le 23 mars 1849 à la suite de l'abdication de son père après la défaite de Novare, Camille de Cavour réalisa l'Unité Italienne au profit de son souverain avec l'aide de Napoléon III. Cela conduisit Victor-Emmanuel II à céder à l'empereur des Français, entre autres compensations, le comté de Nice et le duché de Savoie (printemps 1860).

"La vieille Savoie a vécu. L'uniformité de la mode de Paris se substitue à l'originalité des coutumes nationales. La vie provinciale d'autrefois n'est plus qu'un souvenir. Nous devenons quelconques alors que nous étions quelqu'un." - François Descôtes, avocat et écrivain savoyard (1846-1908).

L'éphémère royaume d'Italie (1861-1946)

Le 17 mars 1861, Victor-Emmanuel II devint le premier des quatre rois qui régnèrent sur l'Italie unifiée. Ce même jour, Cavour adressa une lettre à l'écrivain et homme d'Etat Massimo d'Azeglio (1798-1866), rédigée en français comme l'usage le voulait en ce temps, dans laquelle le premier ministre écrivit : "Dès ce jour, l'Italie affirme hautement en face du monde sa propre existence". La journée du lendemain fut marquée par l'ouverture solennelle du premier Parlement national italien. Si Camille de Cavour fut témoin de l'accession de Victor-Emmanuel au trône d'Italie, en revanche, il ne connu pas la fin de son œuvre, car il mourut le 6 juin 1861.

Peu après la proclamation du royaume d'Italie par le Parlement, le marquis d'Azeglio, a qui Cavour avait succédé à la présidence du Conseil en 1852, lança ce mot demeuré célèbre : "Abiamo fatto l'Italia, ora dobbiamo fare gli italiani!" ("Nous avons créé l'Italie, maintenant nous devons créer les Italiens !").L'unité de l'Etat, quant à elle, fut achevée avec la prise de Rome, le 20 septembre 1870, et l'annexion de la plus grande part des Etats du pape, hormis le Vatican. Le 9 janvier 1878, à la mort du roi, son fils Humbert 1er (1844-1900) monta sur le trône. Il aurait pu régner sous le nom d'Humbert IV, mais il rompit avec ses prédécesseurs, souhaitant ainsi marquer que la dynastie de Savoie régnait désormais sur un nouveau royaume. Ce règne fut interrompu le 29 juillet 1900 par l'assassinat du roi, à Monza.

Son fils Victor-Emmanuel III (1869-1947) lui succéda. Souverain plus intéressé par sa vie privée que par l'exercice réel du pouvoir, il fut rapidement relégué au rôle de "fantoche officiel" par le dictateur Mussolini. Ce dernier ne laissa guère le choix au roi qui promulgua, en 1937, les lois raciales : elles lui coûtèrent sont trône neuf ans plus tard.Le 12 avril 1944, sous la pression des Alliés, Victor-Emmanuel III fut contraint de déléguer la lieutenance générale du royaume à l'héritier du trône, mais avec prise d'effet lors de la libération de Rome. Le vieux souverain, tout en restant nominalement roi d'Italie, se retirait des affaires de l'Etat. Ce fut donc le 4 juin 1944, au moment de la libération de Rome que le prince de Piémont, Humbert de Savoie (1904-1983), assuma désormais la charge de lieutenant général du Royaume. Victor-Emmanuel IIl abdiqua le 9 mai 1946 en faveur de son fils Humbert.

Farouche opposant au fascisme, Humbert II ne régna qu'un mois, du 9 mai au 13 juin 1946 ; ainsi fut-il surnommé "Le roi de mai".Le référendum du 2 juin 1946, semble-t-il entaché d'irrégularités, donna victoire à la république contre la monarchie. En même temps fut élue une assemblée constituante. Le 10 juin 1946, la Cour de cassation annonça les résultats de ce référendum, mais ne proclama pas la république, renvoyant le jugement définitif à une séance ultérieure, prévue le 18 juin, en raison des réclamations liées aux résultats.

Le 13 juin, peu après minuit, sans attendre la proclamation officielle de la république par le Cour de cassation, le Conseil des ministres, dans un "coup de main" - qualifié par certains historiens de véritable coup d'Etat - s'empara du pourvoir et proclama l'instauration d'un régime transitoire, pendant lequel l'exercice des fonctions de Chef de l'Etat revenait au Président du Conseil, Alcide De Gasperi. L'Italie se trouvait ainsi en présence de deux Chefs d'Etat : le roi légitime et un président provisoire d'une république pas encore proclamée...

La République italienne

Ce même jour, afin d'éviter une effusion de sang, tandis que la guerre civile menaçait, Humbert II quitta l'Italie en direction du Portugal, sans toutefois abdiquer : il était convaincu de revenir rapidement. Au contraire, un an et demi plus tard, une loi d'exil frappa alors le souverain et les descendants mâles de la Maison de Savoie. Conformément à l'annonce faite, la séance de la Cour de cassation, destinée à proclamer officiellement les résultats du référendum, se tint le 18 juin 1946, à 6 heures du soir, au palais Montecitorio (Chambre des députés), à Rome.

Guiseppe Pagano, premier président de la plus haute juridiction italienne, donna lecture du procès verbal relatif au jugement définitif, puis communiqua les résultats, malgré les contestations, les protestations et les réclamations des monarchistes : 12.717.923 voix en faveur de la république ; 10.719.284 en faveur de la monarchie ; 1.498.136 votes nuls. La république, instaurée par un coup de force après une victoire dans les urnes légitiment contestable, s'offrait ainsi une parure légale a posteriori... Alcide De Gasperi la dirigea à titre provisoire jusqu'au 28 juin 1946, date à laquelle fut élu Enrico De Nicola, premier président de la République, le temps qu'une Constitution soit donnée à l'Italie. Ce dernier céda sa place à Luigi Einaudi le 11 mai 1948.La Constitution de la République italienne, dont le fondement est le Satuto octroyé à ses sujets par le roi de Sardaigne Charles-Albert, fut adoptée le 22 décembre 1947 et promulguée le 27 décembre.

Le lendemain, 28 décembre 1947, l'ancien roi Victor-Emmanuel III mourut, exilé à Alexandrie en Egypte. La Constitution entra en application le jour de l'an 1948. Le 1er paragraphe de l'article XIII des "Dispositions transitoires et finales" de cette Constitution stipulait alors : "Les membres et descendants de la Maison de Savoie n'ont pas le droit de vote et ne sont pas habilités à des fonctions publiques ou des charges électives". Le 2ème paragraphe disposait que : "L'entrée et le séjour sur le territoire national sont interdits aux anciens rois de la Maison de Savoie, à leurs épouses et à leurs descendants mâles".Ces alinéas 1 et 2 de la XIIIème disposition furent abrogés, à l'initiative du gouvernement Berlusconi, par la loi constitutionnelle n° 1 du 23 octobre 2002, promulguée par le président de la République italienne Carlo Azeglio Ciampi, publiée dans la Gazzetta Ufficiale n° 252 du 26 ocotbre 2002, entrée en vigueur le 10 novembre 2002.

Toutefois, en contrepartie, le prince Victor-Emmanuel de Savoie (1937), fils du roi Humbert II, et son fils le prince Emmanuel-Philibert (1972) s'engageaient à reconnaître la forme républicaine du gouvernement italien, au grand dam de leurs cousins, le prince Amédée de Savoie-Aoste (1943), duc d'Aoste, prétendant, lui aussi, au trône d'Italie, et de son fils le prince Aymon de Savoie-Aoste (1967), duc des Pouilles.Après 56 années d'exil, le prince Victor-Emmanuel de Savoie, accompagné de son épouse Marina et de leur fils le prince Emmanuel-Philibert, put fouler à nouveau le sol italien. Ces retrouvailles avec l'Italie eurent lieu dans la matinée du lundi 23 décembre 2002, lors d'un bref voyage avant tout symbolique.

L'après-midi même, les princes furent reçus en audience au Vatican par Sa Sainteté le pape Jean-Paul II. Humbert II de Savoie, dernier roi d'Italie mourut à Genève le 18 mars 1983, âgé de 78 ans ; son corps repose désormais en l'abbaye royale d'Hautecombe, en terre savoisienne, aux côtés du roi Charles-Félix (1821-1831) et des premiers souverains de la dynastie des Blanches Mains. Son épouse la reine Marie-José de Saxe-Cobourg-Gotha (1906-2001) repose dans le même sépulcre. Le souvenir de ce monarque demeure présent au château de Thorens où il était reçu par son ami le comte Jean-François de Roussy de Sales (1928-1999). Dans la mémoire collective, il demeure tel un homme droit, bon, intelligent et très cultivé ; un chef d'Etat dont les Italiens n'auraient pas dû se priver, estiment aujourd'hui les historiens de la péninsule... 

Texte : Gilles Carrier-Dalbion, Guide du Patrimoine des Pays de Savoie. Reproduction du texte même partielle interdite sans autorisation.